Bill Conti

Bill Conti a fait bien mieux que "Rien que pour vos yeux" qui en effet n'est pas du tout terrible, surtout 28 ans plus tard (dans ses dernières réussites, on pourra noter le remake de Thomas Crown). Malgré ça, je suis aussi assez étonné car les styles sont quand même très différents. A moins qu'il ait reçu des consignes très précises. Mais dans ce cas-là, peut-on parler de "nègre"?

kfigaro a écrit:

Et c'est avéré ou non...

J'enquête et vous tiens au courant...

Un ami allemand m'a transmis des extraits d'une interview de Bill Conti datant de 1991 et publiée en Allemagne.
A propos de ses années en Italie fin des années 60 - début des années 70... "Vous étiez engagé comme orchestrateur et vous gagniez 50000 lires pour chaque morceau de 3 minutes fourni. (...) la plupart du temps, il n'y avait même pas de thème... Ici aussi à Los Angeles, vous avez des gens dont les noms apparaissent aux génériques [des films] et dont la musique n'a pas été écrite par eux... J'ajouterais que cela n'est pas un problème spécifiquement italien, français ou allemand... Dans le monde entier, il existe des compositeurs qui travaillent de cette manière-là."

Bàv,

JFH

Ce qui serait intéressant ce serait t'entendre le travail de Conti au début des années 70 pour comparer, mais écrivait-il déjà comme compositeur à cette époque ?

ah tiens, je me rappelle maintenant du remake de "Thomas crown" dont parle Odelay, franchement même là encore la musique ne m'avait pas franchement marqué...

Bon ça y est, je crois que j'ai trouvé l'info :
http://home.versanet.de/~weinholz/bcrec2.html

effectivement Conti a collaboré sur le "Il Giardino Dei Finzi Contini" mais pour uniquement 2 orchestrations, il est également crédité comme pianiste... rien de bien méchant donc (on peut comparer ça au travail de Rostaing pour Sarde par exemple)

Citation :

ah tiens, je me rappelle maintenant du remake de "Thomas crown" dont parle Odelay, franchement même là encore la musique ne m'avait pas franchement marqué...

C'était surtout des pianos qui se répondaient. La partition était plus ou moins basée sur la rythmique de la sublime chanson de Nina Simone "Sinnerman" qui était utilisée lors de la fameuse séquence du musée.

kfigaro a écrit:

Bon ça y est, je crois que j'ai trouvé l'info :
http://home.versanet.de/~weinholz/bcrec2.html

Les informations y sont rachitiques; lorsque Bill Conti* est interrogé sur ses années de travail en Italie, il affirme avoir été nègre ("ghost-writer") pour plusieurs compositeurs de cinéma italiens. Ce site ne l'évoque pas...

Si j'en apprends davantage, je vous en informerai.

*ne réduisons pas son oeuvre à la fanfare de ROCKY et à quelques génériques TV... Varese et Intrada ont édité, ces dernières années, plusieurs de ses partitions moins célèbres mais bien plus intéressantes musicalement parlant... (p.e. GLORIA....)

J'ai divisé le topic du coup parce qu'on commencait à parler plus de Conti que de De Sica

KFigaro s'interrogeait sur les débuts de Bill Conti en tant que compositeur

(cf http://frenchsoundtracks.forumotion.com/general-f6/manuel-de-sica-t263.htm )

Voici ce que Bill Conti raconta au cours d'un séminaire sur la musique de film (tenu en octobre 1983 pour l'Academy of Motion Picture Arts & Sciences). Pianiste dans un bar romain, il mentit à un Anglais travaillant sur un projet de film espagnol [CANDIDATE PER UN ASSASSINO] en affirmant "Je suis un compositeur de cinéma" et reçut la tâche d'écrire la musique de ce film à petit budget. Par la suite, il continua à travailler sur divers films européens de second envergure (il ne fournit aucun titre) et écrivit, comme "nègre", des musiques de films pour plusieurs compositeurs italiens renommés (là encore, aucun nom dévoilé). Il cessa ses activités de "nègre" lorsqu'il prit conscience des salaires encaissés par les compositeurs pour les musiques qu'il écrivait pour eux. Il partit à Milan pour y diriger la troupe italienne de 'Hair'...


(source: revue Soundtrack! de mars 1984)

bàv

JFH

Merci

Citation :

comme "nègre", des musiques de films pour plusieurs compositeurs italiens renommés

deux arguments en faveur de Manuel de Sica :

- il est tout sauf "renommé" ! (contrairement à son père, très connu dans le monde entier) donc je doute qu'il fasse partie des compositeurs italiens évoqués ici... (par exemple en France, un Magne était réputé pour avoir des nègres comme notamment Michel Colombier dont le style mélancolique est notable sur certaines BOs comme "Un singe en hiver", mais si Magne était effectivement hyper renommé en France dans les années 60, le nom du fils de De Sica était presque uniquement relié aux derniers films de son père, et sa production pour le cinéma - réellement très belle, je l'ai encore vérifié ce week-end - est également assez clairsemée vu qu'il a surtout écrit pour le concert)

dans cette interview :
http://fgimello.free.fr/documents/Interview_conti.pdf

il évoque les musiciens suivants : Bruno Nicolai, Henri Mancini, Riz Ortolani, Piero Piccioni (un peu plus renommés justement que Manuel de Sica)... et précise qu'il est retourné aux USA en 1972 (mais on peut imaginer qu'il avait vraisemblablement cessé ses activités de "nègre" depuis 2 ou 3 ans, il est difficile d'être un simple nègre pendant très longtemps, surtout si je me base sur le fait qu'il "prit conscience des salaires encaissés par les compositeurs")

- d'autres part, si je me base sur ce page ci :
http://en.wikipedia.org/wiki/Hair_%28musical%29

j'en déduis que la production italienne de "Hair" date vraisemblablement de 1969 ou 1970, or si Conti cessa ses activités de "nègre" vers cette époque, il ne figure donc plus que comme orchestrateur sur "Il Giardino Dei Finzi Contini"... je peux évidemment me tromper, ce sont des suppositions (dans tous les cas, ça n'enlève rien à l'excellence du "Il Giardino Dei Finzi Contini", de même d'ailleurs qu'au "Singe en hiver" de Colombier/Magne)

Je viens d'écouter cet album intégralement et là encore (en dehors de "Quick exit" plus mélancolique), rien ne se rapproche de l'écriture impressionniste de De Sica : on trouve soit des pistes purement jazz (dont une reprise très belle des "Moulins de mon coeur" par Sting), soit un minimalisme orchestral assez "brillant" et spectaculaire (beaucoup de piano aigu percussif, de célesta et de roulement de cymbales) aux antipodes de la pudeur extrême du "Il Giardino Dei Finzi Contini (nettement plus proche des brésiliens comme Egberto Gismonti ou d'un Philippe Sarde).

J'écoute à l'instant de larges extraits de ce disque (récommandé par Jean-François).

Effectivement il s'agit de jazz symphonique de très bonne facture (avec quelques pistes de très grande beauté comme "Bonding" et "Reunion & Finale") mais là encore le minimalisme percussif teinté de jazz et un peu "extraverti" de "Chase #1" semble aux antipodes du style feutré et discret de De Sica...

ah, je suis tombé aussi sur ce thème :
http://www.jiwa.fr/track/Bill-Conti-11186/The-Karate-Kid-Part-III-25609/Love-Theme-From-The-Karate-Kid-40024.html

la façon dont il orchestre (ici de façon hyper "hollywoodienne" et spectaculaire) et dont il fait évoluer un thème à l'origine pas si mal que ça montre bien le fossé qui le sépare de De Sica ! (euphémisme)

et puis là dessus, c'est un peu l'arroseur arrosé :



Conti pompe presque note pour note les "Planets" de Holst (Mars, Mercure...)

re-"Mars" de Holst là dessus avec en plus un pompage gros comme un camion du "Superman" de Williams... grosses ficelles quand même...

Ces deux partitions sont célèbres pour leurs "emprunts".

Après, le film des Golan - Globus ne méritait certainement même pas une telle musique.

Je l'ignorais mais ici c'est presque un modèle insurpassable pour les dézingueurs de compositeurs de BOs (qui pullulent sur certains forums qui réunissent les plus "fondamentalistes" des amateurs de musique classique et de jazz)

L'une des meilleures partitions (éditées en CD) du compositeur Bill Conti est celle qu'il écrivit pour un téléfilm consacré à Simon Wiesenthal: MURDERERS AMONG US. Cette musique, enregistrée à Budapest sous la baguette de Harry Rabinowitz, fut éditée en 1990 par Bay Cities.

En ce qui concerne les "emprunts" à Holst pour THE RIGHT STUFF (L'Etoffe des Héros), il faut préciser, à la décharge du compositeur, que le réalisateur était obsédé par 'Les Planètes' et qu'il contraignit Conti à sans cesse modifier la musique qu'il lui proposait... quasiment jusqu'au plagiat...

Bàv toutes et tous

JFH

Sinon, saviez vous que jusqu'au dernier moment, c'est Bill Conti qui devait composer la musique de TRUE CONFESSION? Dans le livret du CD, ils disent qu'on ne sais plus vraiment pourquoi il a décliné. Delerue est donc arrivé très tard sur le projet.

Sinon je viens d'écouter sa musique pour LA FORMULE avec Brando et M. Keller. Ca a l'air assez intéressant. Il faudra que je vois ça en détail.

Je vais essayer d'écouter ce que vous me proposez mais j'avoue que je reste sur ma faim pour le moment, seuls quelques passages de "Gloria" m'ont séduit, le reste m'a semblé à des années lumières du raffinement d'un De Sica (qui me passionne bien plus).

J'aime beaucoup de BO que Conti a écrit. Quand il fait des essais en rock ou en électronique je préfère rester à la maison.

Ce qu'on a pas encore parlé c'est sa partition pour UNCLE JOE SHANNON - je l'adore: quelques extraits disponible sur le site internet d'Intrada (CD épuisé).

Comme odelay, je viens d'écouter la musique de "The Formula". Formidable ! Vraisemblablement la meilleure BO de Bill Conti. Une orchestration digne des plus belles pages de Jerry Goldsmith. Un thème principal tout bonnement splendide (Please Stay). Ecriture brillante. Pas de redite. Beaucoup de sensibilité. Aucune mièvrerie. Bref, du grand art ! kfigaro, il faut que tu écoutes ça...

Et ça se trouve facilement ?